On a oublié la Randonnée Nordique !

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Régis Cahn

Régis Cahn

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Au commencement était le ski ! Les ancêtres Suédois nous ont laissé leurs planches, fossilisés dans une tourbière de Laponie il y a 4700 ans. Plus vieux encore, des gravures rupestres de la péninsule de Kola attestent de l’utilisation de ces drôles d’engins il y a 7000 ans.

Si les peuples forestiers (essentiellement en Amérique du Nord) ont inventé la raquette à neige, les skis sont à leurs origines les instruments des grands espaces au relief doux, au Nord de la forêt Boréale. Les utilisait-on pour chasser, garder les troupeaux de rennes ou pour s’amuser ? Sans doute tout cela à la fois. Mais, comme le dit le préhistorien Yves Coppens : “la pensée (le spirit des free riders) ne se fossilise pas !

En 1866 un menuisier du sud de la Norvège initiait une autre révolution. Inventeur des fixations à sangles mais à talon libre, chères aux skieurs de fond (“talon libre, esprit libre”). On lui doit aussi d’avoir compris que si les planches étaient plus étroites au patin qu’à la spatule et au talon, lorsqu’on appuyait fortement dessus en les inclinant, elles tournaient. Les skis paraboliques ne sont qu’une exagération de la forme inventée par Sondre Norheim. De ses multiples trouvailles, la première technique de virage à ski est restée dans l’histoire de la glisse sous le nom de sa province d’origine, le Telemark. En 1888 le ski acquit sa popularité hors des pays nordiques, porté par “l’exploit médiatique” de l’époque : la traversée du Groenland par le Norvégien Fridtjof Nansen. L’histoire du ski, comme on le voit, nous parle de randonnée nordique.

A la découverte des grands espaces !

Le ski des plateaux et des grands espaces.

Au début du siècle, autant qu’un loisir, c’était le moyen de déplacement des médecins, des prêtres ou des facteurs lors de leurs tournées hivernales. Dans le Jura, où la neige est abondante dès mille mètres d’altitude, les locaux avaient le privilège de pouvoir chausser devant la porte de la maison. Dans cette Scandinavie française, le loisir hivernal n’a jamais cessé d’être ancré dans le quotidien des gens. C’est sans doute le seul endroit de l’hexagone où l’on puisse réellement parler d’une tradition nordique. Le relief y est doux, de larges allées traversent l’imposante forêt et les grandes combes déboisées pour le pâturage permettent de ce déplacer presque partout. D’autres massifs montagneux au relief doux se prêtent à la pratique. Si les forêts sont un lieu de balade privilégié des amoureux de la nature, en hiver, lorsque les arbres sont couverts de neige, que les arbustes prennent des formes fantastiques, une randonnée dans ce milieu confère à la magie. On s’y abrite du vent et les allées forestières offrent une sécurité non négligeable quand il s’agit de s’orienter par mauvais temps. Mais le ski de fond s’exprime pleinement dans les prairies, les alpages et les grands plateaux de moyenne montagne où la vue porte loin. Les ondulations et les reliefs crées par le vent ne sont pas sans rappeler les dunes et les paysages des déserts. L’hiver 2005, la France entière était devenue une gigantesque zone nordique, et je ne serais pas étonné que quelques audacieux aient tenté la traversée de la Beauce ou de la Normandie.

Le ski de découverte et des origines…

La randonnée nordique, c’est pour qui ?

On entend souvent dire, (par des gens bien informés…) que le ski de fond, c’est dur et très technique. Comme si le ski nordique était réservé aux très bons skieurs, l’alpin aux moyens et la raquette aux fainéants… J’arrête, j’en vois au fond de la salle qui protestent ! Les chiffres nous apprennent pourtant que chez les pratiquants de la raquette à neige, on trouve beaucoup de skieurs alpins… Lorsqu’on les croise, ils regardent notre matériel en disant : “ ça a pas l’air mal vos trucs “. Ils restent bouche bée lorsqu’ils apprennent que l’on parcourt dans la journée une étape qui leur demande 2 jours. Alors qu’il était dans les années 70 et 80 le moyen exclusif de déplacement sur les grands plateaux, c’est comme si le ski de fond avait disparu des montagnes, submergé pas le raz de marée de la raquette à neige. Les gens ne savent tout bêtement plus que l’on peut aussi se balader en glissant, et pour les plus sportifs, traverser les déserts enneigés avec un outil très efficace.
Bien sûr, il s’agit de ski hors piste. Autant qu’en ski alpin, c’est forcément plus difficile que de skier sur une piste damée. Mais un skieur alpin à l’aise sur une piste rouge peut envisager sans problèmes la randonnée nordique. Les puristes, adeptes du telemark virent en élégantes génuflexions, les artistes godillent droit dans la pente ou s’attaquent au ski de couloir et les autres enchaînent sans complexes les traversées et les virages en Stem. La glisse nordique est avant tout affaire d’efficacité. Quand aux skieurs de montagne, ils sont toujours étonnés par les distances parcourues et, corollaire, la variété des paysages que l’on traverse. Les acharnés parlent de “ski libre”. On monte, on descend, on glisse et on va où l’on veut avec un même matériel ultra léger.
Reste l’itinéraire, les endroits où l’on pratique le “ski libre” font parfois figure de déserts. Lorsque l’on traverse la Margeride ou le Césalier dans le Massif Central, quelques minuscules hameaux font office de rares balises dans ces étendues immenses. Le sens de l’orientation, plus que la technique du ski reste la qualité primordiale du randonneur nordique.

Une discipline ouverte à tous !

La randonnée nordique, c’est pour qui ?

Pour ceux qui hésitent, les zones nordiques proposent des dizaines de kilomètres de pistes pour vos premières randonnées. Vous trouverez des loueurs si vous ne possédez pas de matériel, les pistes damées faciliteront vos premières glissades et le balisage vous permettra sans problème de retrouver votre point de départ. Un moniteur pourra également guider vos premiers pas en vous donnant quelques bases de technique qui rendront toujours la suite plus agréable.
Choisissez des endroits où la glisse nordique est dans son terrain d’élection, où les forêts enneigées vous feront voyager au Canada, où les grands plateaux aux congères sculptées par le vent vous transporteront en Scandinavie. Le Jura et ses combes, les espaces infinis et dénudés du Massif Central, les plateaux du Sud Vercors ou du Revard, au dessus de Chambéry. Les frais engagés par les communes pour assurer la sécurité, le damage, le balisage et les secours sur les zones nordiques sont conséquents. Il vous sera donc demandé une participation d’un prix en gros équivalent à celui d’une place de cinéma. Si cette redevance vous agace, vous commencerez directement hors-piste. L’accès à la nature n’est heureusement pas encore payant.
Poursuivez votre progression par quelques escapades hors traces au départ des zones nordiques. Traversez entre deux pistes ou deux domaines de ski de fond, ou poussez plus loin que la plus lointaine des pistes. Pour cela, il peut être prudent de reporter le tracé des pistes sur une carte IGN. Cela permet de se familiariser avec un outil qui sera obligatoire par la suite. Après, à vous les grands espaces pour une randonnée d’un ou plusieurs jours. Les terrains propices à la randonnée nordique sont en général sur les mêmes massifs que ceux qui offrent des pistes damées (ces dernières restant une alternative si la météo est mauvaise). Les vrais amoureux de l’hiver, du ski et des grands espaces ne pourront qu’aimer la randonnée nordique.


Texte : Éric Charron - Accompagnateur Moyenne Montagne
26420 La Chapelle en Vercors
Tél : 04 75 48 25 18
anouk.charron@free.fr

Photos : Régis Cahn

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